Une nouvelle formation au Cnam

Bachelor Entreprendre dans les métiers d’art

12 mai 2025

© Vignette  : Konstantin Evdokimov (Unsplash).
L'Institut pour les savoir-faire français, dont la mission est d'encourager la pérennisation et le développement des entreprises des métiers d’art et des savoir-faire d'exception, a recensé 281 métiers d’art en France. Peinture, sculpture, gravure, ou encore joaillerie et horlogerie en font partie. Mais comment créer sa propre entreprise et vivre de son activité dans des métiers de niche ? Le nouveau Bachelor Entreprendre dans les métiers d’art se veut une solution pour bien se préparer.

Le Bachelor Entreprendre dans les métiers d’art s’est donné pour objectif de professionnaliser les apprenants et de les accompagner dans leur insertion dans la vie active. Cela passe par la construction d’un projet personnel et professionnel permettant l’acquisition de solides connaissances – aussi bien théoriques que pratiques – ainsi qu’une montée en compétences dans l’apprentissage des savoir-faire liés aux métiers d’art et de méthodologies nécessaires à la création, reprise, transmission ou développement d’un projet d’entreprise.

3 compétences clés

  • Compétences cœur de métier liées aux connaissances spécifiques des filières professionnelles des métiers d’art : appréhender les outils et méthodes de création et de conception, définir une démarche de projet et affirmer une approche singulière du projet ;
  • Compétences entrepreneuriales : appréhender, maîtriser et expérimenter la conduite d’un projet entrepreneurial via l’appropriation d’outils et de méthodes et une mise en situation professionnelle en entreprise (stage, alternance, contrat professionnel ou entreprenariat pendant le cursus, projets tutorés) ;
  • Compétences transverses et interdisciplinaires : apprendre à apprendre, mener une recherche documentaire, prendre des notes, prendre la parole en public, lire, analyser, produire des textes, utiliser les outils numériques. L’anglais est par ailleurs obligatoire et la pratique d’une autre langue est possible au regard du projet professionnel, notamment en s’appuyant sur le parcours personnalisé en langues du Cnam.

Le Bachelor Entreprendre dans les métiers d’art s’adresse aux diplômés des formations professionnelles de niveau 4 en métiers d’art : brevet des métiers d’art, bac professionnel, bac technologique. Il est en outre possible d’intégrer le programme autrement. Expérience professionnelle d’au moins 5 ans en l’absence d’un diplôme de niveau 4 pour une entrée en année 1. Pour intégrer directement l’année 2, il faut avoir validé une année dans le même domaine d’études supérieures justifiant des acquis des fondamentaux en métiers d’art et l’équivalence des unités entrepreneuriales de la première année du Bachelor (bac+ 1 Management entrepreneurial et projet d’activité).

Notons que le Bachelor Entreprendre dans les métiers d’art permettra sous certaines conditions la double diplomation avec la licence professionnelle Manager et développer une TPE du Cnam (LP119).

Sandrino Graceffa, professeur du Cnam et responbable du Bachelor Entreprendre dans les métiers d'art3 QUESTIONS À SANDRINO GRACEFFA, PROFESSEUR DU CNAM, TITULAIRE DE LA CHAIRE ENTREPRENEURIAT ET ÉCONOMIE DE LA PROXIMITÉ, REPONSABLE DU BACHELOR

Pour quelles raisons avoir créé ce nouveau bachelor ?

La création du Bachelor Entreprendre dans les métiers d'art (BEMA) est née d'une réflexion partenariale entre le campus d’excellence Mode, métiers d’art & design, implanté au cœur de la Manufacture des Gobelins, HESAM Université (dissoute en 2024) et Cnam Entrepreneurs. Ce projet est soutenu par l’État dans le cadre du Programme d'investissement d'avenir (PIA).
Dès l'origine, notre ambition a été de combler un vide dans l'offre des formations supérieures dédiées aux secteurs créatifs. De nombreux jeunes issus des filières métiers d’art (arts graphiques, verrerie d'art, maroquinerie, mode, etc.) acquièrent au lycée d’excellentes bases techniques, mais manquent souvent d’accompagnement pour approfondir leur pratique et construire un projet professionnel autonome. Nous répondons également à un enjeu de transmission : de nombreux artisans d’art, notamment en Île-de-France, cherchent à transmettre leur savoir-faire avant leur départ à la retraite, sans toujours trouver de repreneurs.
Par ailleurs, les modalités d'exercice de ces métiers évoluent. Hier, il suffisait d’ouvrir son propre atelier ou sa boutique ; aujourd'hui, la réussite dans l’artisanat d’art repose davantage sur la capacité à s'insérer dans des réseaux de coopération, ancrés dans des territoires et des filières spécifiques.
Enfin, si la maîtrise technique et créative reste essentielle, elle doit aujourd'hui être complétée par de solides compétences entrepreneuriales. Il ne s'agit pas uniquement de gestion ou de commercialisation, mais aussi de savoir intégrer les enjeux sociétaux et environnementaux contemporains. Le secteur de la mode et du textile, par exemple, est aujourd'hui interpellé sur ses pratiques en matière d'inclusion et d'impact environnemental. Nos futurs entrepreneurs créatifs doivent être préparés à comprendre et accompagner ces mutations pour répondre aux attentes d'une société en transition.

Lire la suite de l'entretien avec Sandrino Graceffa

Ce programme donne-t-il toutes les clés à celles et ceux qui souhaitent fonder leur propre entreprise dans le domaine des métiers d’art ?

Au-delà des compétences liées au cœur de métier et à l’entrepreneuriat, cette formation, déployée sur trois années, constitue une étape essentielle pour construire un projet professionnel solide et singulier.
Durant cette période, nos étudiants ont l'opportunité de consolider leur formation initiale, d'acquérir de nouveaux savoirs, et surtout de confronter leur pratique créative à celle de professionnels confirmés et de leurs pairs. La dynamique collective, nourrie par des talents issus d’univers aussi variés que les arts graphiques, la mode, la céramique, la verrerie d’art, la maroquinerie, la marqueterie, l'orfèvrerie ou encore le tatouage, constitue le socle d'un réseau professionnel indispensable à la réussite d’un projet entrepreneurial.
La confrontation régulière de leur démarche de création à des expertises diversifiées représente une véritable richesse : elle permet d'améliorer leurs pratiques, d’affiner leur identité artistique et de structurer un projet entrepreneurial différenciant.
L’approche de l’entrepreneuriat que nous défendons invite avant tout à imaginer une offre originale, en phase avec les enjeux contemporains d’une société en mutation, tout en s’inscrivant dans des réseaux de coopération variés : académiques, sectoriels, mais aussi alternatifs et territoriaux, tels que les fablabs, tiers-lieux ou fabriques de territoire.

Il semblerait que les métiers d’art aient de nouveau le vent en poupe : pourriez-vous dresser un état des lieux du secteur ?

Effectivement, nous assistons à une situation paradoxale : plus l’économie se dématérialise et se mondialise, plus se renforce le besoin d’ancrage dans le réel, de contact avec la matière et de reconnexion avec des savoir-faire concrets. Le développement d’une économie immatérielle, numérique et globalisée, s’accompagne d’une quête de sens dans le travail, d’un attrait croissant pour la proximité, l’artisanat, le « faire soi-même » et l’esthétique du beau.
Cette tendance, amplifiée par l’expérience du recentrage sur la sphère privée induite par la crise sanitaire et les confinements successifs, se traduit notamment par une valorisation médiatique des reconversions professionnelles. De nombreux cadres supérieurs quittent ainsi leurs postes pour créer des entreprises locales et artisanales, en quête d’activités plus respectueuses des enjeux environnementaux. Toutefois, au-delà du rêve, ces reconversions réussies passent généralement par une formation spécifique et par la structuration rigoureuse d'un projet entrepreneurial, bien éloigné des idéalisations véhiculées par certains médias.
La dynamique économique du secteur des métiers d’art est encore largement sous-estimée en France, en grande partie parce qu’elle repose sur un tissu de très petites unités entrepreneuriales, à l’image d’une part importante de l’économie marchande nationale. Grâce au travail de l’Institut pour les savoir-faire français et à l’engagement de la Fondation Bettencourt Schueller, nous disposons désormais de données précises permettant d’en mesurer l’ampleur. Le secteur rassemble aujourd'hui plus de 500.000 actifs, dont 280.000 salariés, au sein de 234.000 entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires cumulé de 68 milliards d’euros, soit davantage que celui de l’industrie pharmaceutique française en 2022 (62 milliards d’euros, source : Les entreprises du médicament). Fondé sur l’exigence, la maîtrise technique et la qualité de la production, son modèle économique se distingue par un taux de valeur ajoutée moyen de 34%, supérieur à la moyenne nationale de 28,5%, avec un rôle particulièrement moteur des PME, qui génèrent 53,5 % de cette valeur.