Ils ont analysé les données de santé de 92 000 adultes participant à l'étude de cohorte française NutriNet-Santé, en évaluant spécifiquement leur consommation de ce type d'additifs alimentaires. Les résultats de cette recherche suggèrent une association entre l'ingestion de certains additifs émulsifiants et un risque accru de cancers, en particulier du sein et de la prostate ; résultats qui ont été publiés dans la revue PLoS Medicine.
En Europe et en Amérique du Nord, 30 à 60 % de l’apport énergétique alimentaire des adultes provient d’aliments ultra-transformés. De plus en plus d’études épidémiologiques suggèrent un lien entre une consommation élevée d’aliments ultra-transformés et un risque accru d’obésité, de maladies cardiométaboliques et de certains cancers.
Les émulsifiants figurent parmi les additifs les plus couramment utilisés dans ces aliments. Ils sont souvent ajoutés aux aliments industriels transformés et emballés tels que certaines pâtisseries, gâteaux et desserts, glaces, barres chocolatées, pains, margarines et plats préparés, afin d’améliorer leur apparence, leur goût, leur texture et leur durée de conservation. Ils comprennent notamment les mono- et diglycérides d’acides gras, les carraghénanes, les amidons modifiés, les lécithines, les phosphates, les celluloses, les gommes et les pectines.
Comme pour tous les additifs alimentaires, la sécurité des émulsifiants a été précédemment évaluée sur la base des preuves scientifiques disponibles à l’époque. Pourtant, certaines recherches récentes suggèrent que les émulsifiants pourraient perturber le microbiote intestinal et augmenter le risque d’inflammation, pouvant potentiellement favoriser la survenue de certains cancers. Pour la première fois au niveau international, une équipe de chercheuses et chercheurs français s’est intéressée aux relations entre les apports alimentaires en émulsifiants et le risque d’apparition de plusieurs localisations de cancers dans une grande étude en population générale.
Les résultats sont fondés sur l’analyse des données françaises de 92 000 adultes (âge moyen 45 ans ; 79 % de femmes) qui ont participé à l’étude de cohorte NutriNet-Santé (voir encadré) entre 2009 et 2021.
Sources
Food additive emulsifiers and cancer risk: results from the French prospective NutriNet-Santé cohort
Laury Sellem1,2,#, Bernard Srour*,1,2,#, Guillaume Javaux1, Eloi Chazelas1,2, Benoit Chassaing2,3, Emilie Viennois4, Charlotte Debras1,2, Nathalie Druesne-Pecollo1,2, Younes Esseddik1, Fabien Szabo de Edelenyi1, Nathalie Arnault1, Cédric Agaësse1, Alexandre De Sa1, Rebecca Lutchia1, Inge Huybrechts5, Augustin Scalbert5, Fabrice Pierre2,6, Xavier Coumoul2,7, Chantal Julia1,8, Emmanuelle Kesse-Guyot1,2, Benjamin Allès1, Pilar Galan1,2, Serge Hercberg1,2,8, Mélanie Deschasaux-Tanguy1,2, Mathilde Touvier1,2
# Equal contributions. Joint first authors
1 Université Sorbonne Paris Nord and Université Paris Cité, Inserm, INRAE, CNAM, Center of Research in Epidemiology and StatisticS (CRESS), Nutritional Epidemiology Research Team (EREN), Bobigny, France
2 Nutrition And Cancer Research Network (NACRe Network), France
3 Inserm U1016, team "Mucosal microbiota in chronic inflammatory diseases", CNRS UMR 8104, Université Paris Cité, Paris, France
4 Inserm U1149, Center of Research on Inflammation, Université Paris Cité, Paris, France
5 International Agency for Research on Cancer, World Health Organization, Lyon, France
6 Toxalim (Research Centre in Food Toxicology), Université de Toulouse, INRAE, ENVT, INP-Purpan, UPS, Toulouse, France
7 Inserm UMR-S 1124, Université Paris Cité, Paris, France
8 Public Health Department, Groupe Hospitalier Paris-Seine-Saint-Denis, Assistance Publique-hôpitaux de Paris (AP-HP), Bobigny, France
Plos Medicine, 13 février 2024
Contacts chercheurs
Mathilde Touvier
Directrice de recherche Inserm
Directrice de l’Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle Eren, unité 1153 Inserm/ INRAE/Cnam/Université Sorbonne Paris Nord, Université Paris Cité, Centre de recherche en épidémiologie et statistiques (Cress)
m.touvier@eren.smbh.univ-paris13.fr
Bernard Srour
Chercheur post-doctoral Inserm
Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle Eren, unité 1153 Inserm/ INRAE/Cnam/Université Sorbonne Paris Nord, Université Paris Cité, Centre de recherche en épidémiologie et statistiques (Cress)
b.srour@eren.smbh.univ-paris13.fr