"Surveillance de Covid-19 à l’hôpital : dépister uniquement les cas symptomatiques ne suffit pas"
8 décembre 2020
Le projet MOD-COV : la genèse
Modelling of the hOspital Dissemination of SARS-CoV-2
Ce projet porté par Laura Temime, directrice du laboratoire Modélisation, épidémiologie et surveillance des risques Sanitaires (MESuRS) du Cnam et Lulla Opatowski, chercheuse au laboratoire Épidémiologie et modélisation de la résistance aux antimicrobiens U1181 (Institut Pasteur/Inserm/Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines). Adapté à partir des modèles déjà développés par le laboratoire, il permettra d’évaluer le risque associé à la transmission nosocomiale du SRAS-CoV-2 pour les patient.e.s et les personnels de santé. Les analyses des simulations viendront ainsi en soutien à la prise de décision sur la mise en place de mesures destinées à limiter la dissémination du virus dans les établissements de soins. À plus long terme, ces travaux aideront également à mieux comprendre les caractéristiques épidémiques du SRAS-CoV-2 et fourniront des outils et des procédures qui pourront être utilisés lors de futures épidémies.
En savoir plus sur le projet MOD-COV déposé auprès de l'ANR
6 mois plus tard, des premiers résultats prometteurs
Les chercheuses résument ainsi leur travail :
« Les hôpitaux, en première ligne dans la lutte contre la Covid-19, sont des lieux à haut risque de circulation du virus. Même dans les hôpitaux de soins de suite et de long séjour, qui ne sont pas censés accueillir de patients atteints de la Covid-19, le virus peut être importé via l’admission de patients ou de personnels qui auraient acquis le virus en communauté ou dans un autre lieu de soin. Mais détecter au plus vite sa présence est rendu difficile par plusieurs facteurs : une importante part de personnes infectées est peu ou pas symptomatique ; beaucoup de lieux de soin ne disposent que de faibles ressources en termes de dépistage. Par une étude de modélisation s’appuyant sur une description fine des contacts au sein d’un hôpital de soins de suite, nous avons analysé l’efficacité d’une large gamme de stratégies de surveillance.
Nous montrons que les stratégies largement mises en place depuis mars, qui consistent à ne dépister via PCR que les personnes présentant des symptômes de Covid-19, sont relativement peu efficaces. Si la capacité en tests n’est pas trop faible, les « cascades » de dépistage permettent de détecter significativement plus tôt la circulation du virus et d’éviter ainsi des épidémies nosocomiales de tailles importantes. Lorsque les ressources sont faibles (> 2 tests / 100 lits / jour), nous montrons l’intérêt des tests dit « poolés ». Ces stratégies, déjà mises en place dans plusieurs pays, consistent à combiner des échantillons de plusieurs individus afin de les analyser sous un seul test PCR.
Dans l’ensemble, nos résultats démontrent la vulnérabilité des milieux de long séjour aux épidémies de Covid-19, les défis liés à leur surveillance, et permettent de proposer des stratégies pour détecter au mieux le virus de Covid-19 dès son introduction à l’hôpital. »
Ces travaux ont fait, le 8 décembre dernier, l'objet d'une publication, en open access, dans la revue scientifique BMC Medicine :
Optimizing COVID-19 surveillance in long-term care facilities: a modelling study
David R. M. Smith, Audrey Duval, Koen B. Pouwels, Didier Guillemot, Jérôme Fernandes, -Bich-Tram Huynh, Laura Temime, Lulla Opatowski & on behalf of the AP-HP/Universities/Inserm COVID-19 research collaboration