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Clotilde Ferroud, directrice déléguée à la recherche au Cnam
Peu de femmes occupent des postes à responsabilité ou des emplois de direction dans le secteur public, et je pense qu’il est difficile de déterminer s’il s’agit de discrimination (lors de la procédure de recrutement ou de promotion), de moindre ambition ou d’autocensure. Cependant, les chiffres sont en évolution positive : le % de femmes à la direction des universités par exemple est passé de 5% il y a une quinzaine d’année à environ 15% actuellement. Il est admis que les postes hiérarchiquement élevés impliquent un investissement temps important, plus difficilement conciliable avec une vie de famille encore souvent à la charge des femmes, et de fait, celles-ci accèdent à ces postes plus tardivement dans leurs carrières.
Des études montrent qu’il est encore souvent nécessaire de prouver que le genre féminin n’est pas en contradiction avec les responsabilités et la capacité à gérer, que les femmes sont encore mal jugées lorsqu'il faut faire preuve d'autorité, et que le poids des stéréotypes sociaux de genre sur la place des femmes dans les sciences, et en particulier dans les sciences dites dures, reste présent.
Comme pour tout poste à responsabilité, il faut de l’ambition, de la ténacité, de la rigueur, de l’ardeur au travail et du volontarisme. Je pense que toute femme évolue aussi bien qu’un homme dans le monde du travail, à compétences égales. Même si, être une femme nécessite peut-être encore de devoir davantage démontrer son professionnalisme…
Pour ma part, j’ai le sentiment d’être respectée et appréciée pour mon travail et non parce que je suis une femme (même s’il m’est arrivée d’entendre l’argument des quotas à l’occasion d’une promotion). Par ailleurs, je n’ai pas le sentiment d’avoir fait de sacrifices pour faire progresser ma carrière en dehors de l’effort et du travail. Pour moi, être une femme ne doit pas obliger à s’affirmer plus, ou à déployer plus d’énergie pour convaincre, voire même à se justifier.
La loi qui impose un quota de femmes dans certaines instances permet certes de faire évoluer les mentalités, mais il faut impérativement que, rapidement, l’on n’ait plus besoin du système de quotas et que l’équilibre soit naturel.
Lorsque l’on a la chance d’exercer un métier riche et passionnant, la motivation, le travail et la persévérance vont naturellement de pair avec un investissement fort, et s’en suivent des carrières féminines indifférenciées de celles des hommes.
Johanna Roux, directrice adjointe déléguée à la recherche au Cnam
À l’exception d’un homme, mes mentors ont toujours été des femmes et c’est le cas aujourd’hui.
Cela a-t-il changé quelque chose dans le travail ? Je ne saurais pas vraiment le dire ! En effet, elles.il partagent des valeurs communes même si la manière de les exprimer est différente. Elles.il sont investi.e.s dans leurs fonctions, ont un très fort niveau d’exigences allié à des capacités de travail hors norme au service de l’enseignement supérieur et de la recherche et des établissements au sein desquels elles.il travaillent.
Qu’elles.il soient enseignant.e.s chercheur.euse.s ou personnels administratifs, elles.il m’ont transmis (et je les en remercie vivement) leur vision du service public, de l’intérêt commun, le sens de la loyauté, le goût du travail intense et pro actif, la nécessité d’analyser les processus globalement et non sur un périmètre restreint pour comprendre nos systèmes, les faire évoluer, les rendre plus efficients le cas échéant. La contrepartie est un engagement et un investissement sans faille. Le tout est source de motivation, de créativité et d’épanouissement.
Dans mon environnement professionnel, femmes et hommes sont présents mais il faut bien constater que plus on s’élève dans la hiérarchie et moins il y a de femmes, que le terme « maitresse de conférences » choque encore, qu’il y a peu de PR (professeur.e.s des universités) et PRCM femmes (professeur.e.s du Cnam), ... Nous avons tous les outils législatifs et réglementaires à notre disposition, à nous de les faire vivre au quotidien !
A mon sens, pas de révolution. Mais chaque jour, des « petites » actions comme respecter la parité dans les jurys de soutenance de thèse dans les secteurs où de nombreuses femmes sont présentes, comme désigner des femmes pour présider les jurys, comme recruter des équipes mixtes, comme inciter les femmes à candidater sur les fonctions électives …
Est-ce que j’aime travailler dans un milieu exclusivement féminin ? La réponse est non, tout est bien sûr question d’équilibre !