 
          
            38
          
        
        
          
            mag'
          
        
        
          Vous pointez un système éducatif en proie à des
        
        
          difficultés accrues et accusant un fort retard par
        
        
          comparaison à ses voisins européens...
        
        
          L’enquête TIMSS
        
        
          1
        
        
          nous montre que les élèves français de
        
        
          CM1 sont ceux qui entretiennent avec les mathéma-
        
        
          tiques et les sciences le rapport le plus difficile. Selon
        
        
          ces enquêteurs, seuls 61% des enseignants français se
        
        
          sentent à l’aise pour améliorer la compréhension de
        
        
          leurs élèves contre 79% en Europe. Les jeunes Français
        
        
          lisent également moins bien que la moyenne de leurs voi-
        
        
          sins européens. L’enquête Pisa
        
        
          2
        
        
          a montré que les perfor-
        
        
          mances des élèves français diminuent au fil des années
        
        
          avec une augmentation des écoliers les plus en difficulté.
        
        
          L’origine sociale des parents conditionne massivement la
        
        
          trajectoire scolaire des enfants. Entre 2011 et 2015, le
        
        
          nombre d'élèves issus des milieux socioéconomiques
        
        
          défavorisés obtenant malgré tout d’excellents résultats
        
        
          dans le système éducatif français est par exemple passé
        
        
          de 7,5% à 3%. Alors que dans le même temps, l’Alle-
        
        
          magne voit cette même part augmenter de 5,6% à 8,7%.
        
        
          Cette situation ne peut pas nous laisser indifférents.
        
        
          Les difficultés du système éducatif français sont concen-
        
        
          trées sur l’école maternelle et élémentaire. Les politiques
        
        
          publiques d’apprentissage sont en situation de décéléra-
        
        
          tion et la formation professionnelle est puissamment
        
        
          anti-redistributive. Ainsi, cinq chômeurs sur six n’ont
        
        
          pas accès à des formations pour améliorer leurs compé-
        
        
          tences. Les études sur le taux d’emploi des jeunes
        
        
          laissent apparaître des divergences fortes, qui se
        
        
          creusent depuis la crise financière de 2008.
        
        
          Face à ces difficultés, quelles solutions
        
        
          proposez-vous?
        
        
          D'abord d’améliorer la courbe de financement de l’édu-
        
        
          cation nationale, car l’enseignement secondaire – le
        
        
          lycée particulièrement – reçoit actuellement des
        
        
          financements importants et le déséquilibre se creuse au
        
        
          détriment du primaire. Par ailleurs, la place de l’enfant
        
        
          dans le système scolaire doit être repensée. Son déve-
        
        
          loppement et son bien-être sont primordiaux. Or, les
        
        
          précédentes réformes ne les ont pas placés au centre
        
        
          des considérations. La réforme des rythmes scolaires
        
        
          n’a par exemple pas servi leur cause. Il aurait fallu oser
        
        
          diminuer les vacances d’été contre la suppression de la
        
        
          demi-journée de cours supplémentaire. Ne dispenser
        
        
          aucun cours pendant deux mois est une mauvaise
        
        
          mesure.
        
        
          D'autre part, les politiques publiques éducatives doivent
        
        
          laisser davantage de liberté au terrain. Une refonte de la
        
        
          formation continue des enseignants s’impose. Sur le mil-
        
        
          liard d’euros consacré à la formation des enseignants,
        
        
          une part trop marginale est consacrée à l’achat d’heures
        
        
          de formation.
        
        
          Il faudrait aussi améliorer l’autonomie des établisse-
        
        
          ments scolaires. Les directeurs d’écoles primaires ont
        
        
          très peu de pouvoir. Dans le secondaire, les équipes
        
        
          doivent disposer d’une marge de manœuvre afin de des-
        
        
          siner des projets permettant de différencier les
        
        
          établissements.
        
        
          Enfin, il n’y a pas d’autonomie sans responsabilité.
        
        
          Celle-ci se niche dans l’évaluation. L’association Agir
        
        
          pour l’école déploie par exemple des méthodes insufflées
        
        
          par la psychologie cognitive dans des territoires sen-
        
        
          sibles pour évaluer les gains en lecture des élèves.
        
        
          Certaines classes concentrent entre 5% et 10% d’élèves
        
        
          en grande difficulté en matière de conscience phonolo-
        
        
          gique, d’autres 15-20%, ou 40, voire 75%! Ces résultats
        
        
          prouvent qu’une politique homogène ne peut être effi-
        
        
          cace, compte tenu de l’hétérogénéité des classes. Tous
        
        
          les établissements secondaires doivent être évalués au
        
        
          moins une fois tous les trois ans, le diagnostic doit être
        
        
          
            Construire l'avenir
          
        
        
          
            Notre système a démocratisé
          
        
        
          
            l’accès à l’enseignement
          
        
        
          
            mais pas la réussite»
          
        
        
          Après une première séance consacrée à l’industrie française, et en amont d’une autre dédiée au
        
        
          
            Big
          
        
        
          
            Data
          
        
        
          , le club de réflexion Construire l’avenir, initié par le Cnam, s’est penché avec Laurent Bigorgne,
        
        
          directeur de l’Institut Montaigne et président des associations Agir pour l’école et
        
        
          
            Teach for France
          
        
        
          ,
        
        
          sur le système éducatif français. Interview.
        
        
          1:
        
        
          
            Third
          
        
        
          
            International
          
        
        
          
            Mathematics and
          
        
        
          
            Science Study
          
        
        
          .
        
        
          2:
        
        
          
            Program for
          
        
        
          
            International
          
        
        
          
            Student
          
        
        
          
            Assessment.
          
        
        
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