Le Cnam mag' #7 - page 41

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partagé avec les parents et diffusé sur le Web. Nous
devrions nous inspirer des méthodes d’évaluation du
système éducatif en Angleterre qui s’apparentent à de
réelles opérations de vérité, sans jamais être punitives.
En bref, le système éducatif français a permis de démo-
cratiser l’accès à l’enseignement. Cependant, nous
n’avons pas démocratisé la réussite. Repenser le finan-
cement, remettre les enfants au cœur du système, for-
mer et collaborer avec les enseignants, et refondre le
système d’évaluation me semblent des pistes fondamen-
tales qu’il faut mettre en œuvre au plus vite.
Mal classée dans l’enquête Pisa de 2001, l’Allemagne
a entrepris de nombreuses réformes qui lui ont
permis de sortir de l’ornière. Quels enseignements
peut-on en tirer?
L’enseignant allemand bénéficie d’une considération très
différente de son homologue français. Sa position
sociale, sa rémunération, son image dans la société sont
bien meilleures. L’éducation nationale doit accompagner
les enseignants et s’assurer de la bonne formation de ces
derniers, dans la bienveillance mais sans complaisance.
Ce souffle doit être insufflé depuis le haut de la pyra-
mide. L’effet d’asphyxie dans lequel nous nous trouvons
est aussi le fruit d’une alternance politique conduisant
des réformes souvent contradictoires avec celles de la
majorité précédente. L’organisation du système éducatif
et l’analyse de ses défaillances expliquent certainement
nos divergences de performances avec le système
allemand.
Comment réformer la formation des enseignants ?
La refondation de l’école ne peut pas s’appuyer unique-
ment sur la formation initiale des enseignants, car les
recrutements sont trop faibles. Le corps enseignant ne
se renouvelle en effet qu’à hauteur d’environ 3% par an.
Je déplore une formation continue défaillante et une for-
mation initiale qui ne répond pas aux objectifs du sys-
tème éducatif. Pour pallier cela, je propose le
développement d’une formation en alternance dès la
licence.
L’Institut Montaigne a publié un travail sur le compte
emploi-formation. La formation professionnelle des
enseignants en dehors de leur temps de travail en classe
ne peut se réaliser sans incitations. Elle doit être
monétisée.
L’entreprise a-t-elle sa place dans l’enseignement ?
Je suis convaincu que les entreprises ont un rôle majeur
à jouer dans l’enseignement professionnel. Je souhaite
que nous doublions ou triplions le nombre d’apprentis ou
d’alternants présents dans cette voie. Systématiser l’in-
terpénétration des centre de formation des apprentis
(CFA) et des lycées professionnels me semble un enjeu
majeur. Aussi, les rencontres entre les cadres du minis-
tère et les chefs d’entreprise ne sont pas assez fré-
quentes. Les craintes selon lesquelles les entreprises
souhaiteraient formater le cerveau des élèves sont tota-
lement aberrantes et infondées !
Comment rétablir l’équité en matière d’orientation
des élèves ?
Il faudrait renforcer la transparence sur les filières
d’orientation. Rétablir l’équité en matière d’orientation
nécessite le courage de publier les taux de réussite et
l’efficacité des formations dispensées dans chaque éta-
blissement. Ainsi, les élèves pourront se faire leur
propre opinion sur chaque formation. L’apprentissage
est la voie normale, qui permet à un élève d’exercer plus
de 200 métiers différents. Je suis favorable au maintien
du collège unique. Nous souhaitons ouvrir davantage de
BTS aux lycées professionnels. 40% des personnes qui
bénéficient des Conventions d’éducation prioritaire de
Sciences-Po proviennent de la classe moyenne. La diver-
sification de l’origine des étudiants est un symbole positif
de la démocratisation de la réussite.
Réunissant sous l’impulsion du Conservatoire, parle-
mentaires, représentant·e·s de la société civile et
expert·e·s, le club de réflexion Construire l’avenir vise à
alimenter le débat public autour de problématiques
sociétales. Intitulée «
l’éducation, le meilleur antidote à
la crise
», le deuxième rendez-vous de ce club avait
pour ambition, selon Olivier Faron, «
de faire partager
la connaissance pour favoriser une société plus inclu-
sive. "L’éducation comme antidote à la crise" est ainsi
une problématique au cœur de nos convictions. Et,
démocratiser la réussite est la plus belle ambition que
nous puissions avoir.
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