Le cnam mag' #9 - page 35

mag'
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Grand angle
Les nouvelles technologies
au service des personnes âgées
C
hez les personnes jeunes, les problèmes de
mémoire consistent à se rappeler de faits passés
et futurs (les choses à faire, alertes, planifica-
tion). Au contraire, chez les personnes âgées, les pro-
blèmes de mémoire les plus handicapants concernent le
moment présent : «Où suis-je ? », «Ai-je effectué telle
action?», «Que suis-je en train de faire ?», «Qui est la
personne en face de moi ? ». Prenons l’exemple d’une
prise de médicament : une personne jeune risque d’ou-
blier de le prendre ; il suffit de le lui rappeler. En
revanche, une personne âgée souffrant de dégénéres-
cence mnésique va plutôt le prendre plusieurs fois, ne se
rappelant pas qu’elle l’a déjà fait. Il faut donc un disposi-
tif qui va l’alerter pour prendre son médicament, mais
surtout qui soit capable de vérifier si l’action a été
accomplie.
Porter, aider à la décision, géolocaliser…
En ce sens, un certain nombre de technologies inno-
vantes nous semblent pertinentes pour aider les per-
sonnes âgées.
Multiformes, les robots peuvent être assez forts pour
soulever une personne, assez agiles pour monter un
escalier, précis pour verser un verre de jus d’orange, et
d’apparence étudiée pour susciter l’attachement.
Particulièrement prisés au Japon, les robots d’accom-
pagnement sont à l’essai en France. L’intelligence artifi-
cielle ouvre aussi la voie à des systèmes d’aide à la
décision en temps réel à partir d’un grand nombre de
données, des systèmes de reconnaissance visuelle ou
vocale allant jusqu’à identifier un visage ou une voix. En
ajoutant via le port de lunettes ou de lentilles, des rensei-
gnements sur les images du monde réel (nom des bâti-
ments, des personnes), la réalité augmentée est un bon
support à l’identification. Elle peut également aider les
personnes mal voyantes en leur décrivant vocalement
les formes et les couleurs des objets environnants.
Quant à la géolocalisation, elle offre la possibilité de
retrouver une personne errante grâce à son bracelet
« anti-fuite » ou de détecter qu’elle tombe grâce à son
bracelet « anti-chute ». Un navigateur GPS intégré au
déambulateur peut aider à regagner le domicile par un
signal sur la poignée gauche ou la poignée droite. La
géolocalisation intégrée à un aide-mémoire lance les
alertes au bon moment : par exemple, rappeler d’acheter
du pain, à proximité de la boulangerie. Destinés à équi-
per la maison d’une personne dépendante, les systèmes
AAL (
Ambiant Assisted Living
) permettront de la sur-
veiller à distance et de détecter tout comportement
anormal.
Clés, lunettes ou autre objet perdu peuvent être retrou-
vés grâce aux étiquettes RFID (
Radio Frequency
Identification
) ou dupliqués avec une imprimante 3D.
Mais de toutes ces aides, c’est la caméra de
lifeloging,
caméra embarquée qui enregistre en continu et envoie
les données à un algorithme sophistiqué de traitement
d’images, qui me semble la plus utile. Elle permet un
regard sur les actions effectuées à l’instant, palliant
ainsi la défaillance de leur mémoire immédiate : « où
ai-je posé mes lunettes ? », « ai-je pris mon médica-
ment ?», «ai-je mis de la levure dans la pâte?».
Par ailleurs, une prothèse de mémoire est actuellement
en cours d’élaboration par nos soins (Métais et al. 2016).
Son but : gérer intelligemment les informations sur l’en-
tourage de la personne, et constituer un système d’infor-
mation personnel.
Bientôt un chien guide augmenté?
Technologie et affectif ne sont pas nécessairement anti-
nomiques. Nous avons proposé (Métais et al., 2015) une
solution novatrice alternative au robot : le concept de
«chien guide d’Alzheimer » ou «chien augmenté». Ce
canidé guidera son maître grâce à la technologie GPS.
Pour cela, le chien sera revêtu d’un manteau connecté
capable de lui envoyer de petites impulsions pour lui indi-
quer le chemin. Outre des services tels que l’alerte en
cas de chute, le chien apportera tout l’effet bénéfique
d’un animal de compagnie pour une personne atteinte de
la maladie d’Alzheimer.
Robotique, intelligence artificielle, réalité augmentée… autant de solutions technologiques pour pal-
lier les handicaps liés à la diminution des capacités motrices, sensorielles, cognitives, et surtout
mnésiques des personnes âgées.
Elisabeth
Métais
1:
E. Métais,
F. Ghorbel,
N. Herradi,
F. Hamdi,
N. Lammari,
D. Nakache,
N. Ellouze,
F. Gargouri,
A. Soukane,
«Memory
Prosthesis»,
dans
Non-
pharmacological
Therapies in
Dementia
,
vol. 3(2), 2015,
pp. 177-180.
2:
E. Metais,
F. Hamdi,
N. Lammari,
D. Nakache,
F. Ghorbel,
N. Ellouze,
N. Herradi,
A. Soukane,
«Vers un système
d’information
personnel
pour l’aide à la
dégénérescence
de mémoire»,
dans
Ingénierie
et management
des systèmes
d’information
,
Décembre 2016,
Cepadues,
pp. 227-241.
1...,25,26,27,28,29,30,31,32,33,34 36,37,38,39,40,41,42,43,44,45,...52
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